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 Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.

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Abigail Violette Somerset

Abigail Violette Somerset



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MessageSujet: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 6:01

Abigail Violette Somerset



surnom(s) ♦ Abby. Mais un certain jeune homme la connaît sous le doux prénom de Violette
date & lieu de naissance, âge ♦ 22 juillet 1844.
situation ♦ Veuve
profession ♦ Héritière
groupe ♦ Femmes.



Ma personnalité
Le maître mot de la personnalité d’Abigail est sans aucun doute l’impulsivité. Elle ne réfléchit jamais avant d’agir, ce qui la met dans des positions très périlleuses. Cependant, énergique, futée, nous pourrions quasiment dire mutine, elle n’est jamais prise au dépourvu et est très débrouillarde.

Cependant, son sens du romanesque est ce qui qualifie davantage la jeune femme. Ayant passé sa vie à lire des romans, elle a le sens du tragique dans le sens. Peut-être prend-t-elle plaisir à son malheur ? Comment le savoir ? Elle le joue si bien. Elle a passé son adolescence à s’imaginer dans les bras de divers héros de romans. De Charles Bingley, à Enjolras, en passant par d’Artagnan et Rochester, la jeune femme les a tous passés, tout en restant fidèle à chacun d’entre eux. Aucun doute possible, la demoiselle est une romantique. Mais pas au sens où on pourrait l’entendre. Elle est romantique comme Delacroix, Goether, Shiller et Nerval l’étaient. D’une romantisme triste et tragique en amour.

Intelligente, Abigail possède une très grande connaissance littéraire, musicale et artistique, raison pour laquelle elle s’est si bien adaptée à son monde de bourgeoise. Mais elle reste rancunière, indépendante et ambitieuse. Dotée de plusieurs passions, Abigail est une jeune femme accomplie qui sait ce qu’elle désire. Si sa vie l’a jusqu’alors désillusionnée, elle reste profondément optimiste.
.



Mon histoire

Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. Cprimp10

-Une autre fille… Liz, que veux-tu que j’en fasse? On a déjà pas assez pour nourrir les trois qu’on a déjà, comment on va faire avec une de plus?

L’homme qui avait prononcé ces mots avec une frustration qu’il tentait de cacher était vers la mi-trentaine, avait déjà une sérieuse calvitie et semblait exténué. La scène se passait dans une pièce meublée très simplement dans laquelle la seule décoration était un crucifix.

-Alors ne me touches plus, Jim!

La réplique avait été cinglante et n’admettait aucune critique. Le regard bleu délavé de la femme qui l’avait dite se fixa sur l’homme devant elle, sans qu’elle ne soit intimidée.

-Ce n’était seulement pas supposé être ça… Tu m’as demandé en mariage, tu m’avais promis de la soie, de la dentelle, une vie facile. Et maintenant, Jim, maintenant que je t’ai marié, je n’ai plus une minute à moi, entre toi et les enfants. Ces morveux pleurent sans arrêt, ils chignent et… toi…

-Moi quoi, hein, Elizabeth? Moi, je travaille toute la journée au champ pour rapporter quelque chose à mettre sur la table le soir. Écoutes, les récoltes sont mauvaises, je n’y peux rien, moi! cria le dénommé Jim, ses yeux bruns exorbités sous la colère.

Sous les hurlements, le paquet de langes se mit à remuer et à crier également. L’homme râla et quitta la maisonnette en claquant la porte derrière lui. Sa femme savait qu’il n’allait revenir que très tard dans la nuit, entièrement ivre, ayant dépensé l’argent de la semaine en boisson. Elle soupira en entrouvrant son corsage pour donner le sein à son nouveau-né. Sa deuxième fille, quatrième enfant et promise à un destin aussi misérable que les trois premiers.

***

-Abby, surveilles ta sœur! Maintenant, j’ai dis!

La fillette soupira en secouant ses boucles blondes puis se leva pour rejoindre sa petite sœur dans le jardin. Si elle était si exaspérée, ce n’est pas car elle devait surveiller Maggie, cela en aucun cas. Abigail adorait littéralement sa sœur, elle en était folle. D’ailleurs, elle s’en était davantage occupée que leur propre mère. Ce qui dérangeait Abigail était la dureté de sa mère, la manière qu’elle avait de leur parler en assenant des ordres à toutes les phrases. Appuyée contre le bois de la maison, Abigail regarda les nuages gris passer au-dessus d’elle. L’humidité de l’air indiquait que la pluie allait être imminente. Encore de la pluie, aucun rayon de soleil. Non, la récolte ne serait pas bonne cette année. Malheureusement, lui indiqua son ventre qui gargouilla.

-Bibi, tenta tendrement Maggie en étirant ses petits bras vers sa sœur.

Abigail, le front chargé d’inquiétude, sourit néanmoins à ce surnom affecteux que lui donnait sa cadette. Au loin, elle voyait Magaret revenir de l’école en gambadant. L’année prochaine, Abigail, ayant atteint ses cinq ans, pourrait y aller. Elle avait déjà si hâte! Passer les journées entières avec sa mère était pour elle un véritable calvaire. Se penchant pour prendre Maggie dans ses bras, elle embrassa sa joue trop creuse chez un bébé.

-Un jour, minette, nous allons vivre dans un palais, crois-moi.

***

Il était près de 22h. Abigail, ses longs cheveux attachés en une hâtive queue-de-cheval, était recourbée sur un ouvrage important à broder. Elle se dépêchait. Elle se piquait toujours les doigts, mais elle n’en avait cure. Les yeux rougis par la fatigue et par le travail, la jeune fille continuait de piquer inlassablement le tissu, malgré sa chandelle presque éteinte et le faible clair-obscure. Derrière la porte de l’unique chambre de la maisonnette, Abigail entendait ses parents se disputer. Encore! Elle ferma les yeux, tentant d’oublier cet environnement nocif. Heureusement que Maggie n’était pas là pour entendre les cris! La plupart du temps, l’aînée faisait tout son possible pour éviter à sa sœur ces conflits. Déjà qu’ils étaient pauvres et affamés, guère besoin n’était d’en rajouter. En ce moment, Maggie était chez leur grand-mère. Jack, Walter et Magaret étaient allés dans une fête dansante donnée au centre du village. Abigail était supposée d’aller les rejoindre. Elle avait si hâte d’y être! La danse était une passion pour la jeune femme et elle adorait toutes les distractions qui pouvaient lui passer sous la main. Mais sa mère l’avait enfermé dans sa chambre pour qu’elle finisse de broder la robe de mariage de la comtesse d’Ulster. Pas moyen de partir avant qu’elle ne soit finie! Mais elle était si exténuée! Ella avait passé la journée à broder des fleurs sur une robe comme elle ne pourrait jamais en porter. Oh, et si elle ne finissait les points de croix que demain matin? La femme de chambre de la comtesse ne devait passer que vers midi… Abigail se décida, déposa la robe, souffla la bougie et sortit de la chambre.

-Tu n’es qu’un lâche!

-Et toi, tu n’es qu’une bonne à rien!

Abigail s’avança dans la pièce, timide, se demandant soudain si c’était la bonne décision à prendre. Mais elle y était, plus moyen de reculer. D’ailleurs, ses parents l’avaient vue et la fixaient maintenant.

-Je sors. Je vais rejoindre Jack et Marge…

-Tu as fini la robe de la comtesse, jeune fille? lui demanda son père avec un ton accusateur.

-Il ne m’en reste que peu. Demain matin.

-Retournes-y immédiatement, Abigail! répliqua sa mère.

-Maman, s’il te plaît, j’ai travaillé toute la journée…

-Et nous? Et nous? Elle se prend pour une martyre, ma foi! ironisa son père.

-Mais je suis exténuée! protesta mollement l’adolescente, savant pertinemment que cela ne servait à rien.

-Mais on s’en fiche! Nous avons besoin de la dizaine de livres que cette robe nous procurera! Retournes dans la chambre maintenant!

Abigail ouvrit la bouche pour répliquer, mais devant le visage de ses parents, elle n’osa pas. Les yeux remplis de larmes, qui brûlaient ses paupières, le menton tremblant, elle obéit. Lorsqu’elle eut refermée la porte et qu’elle fut totalement plongée dans la noirceur, ses épaules se secouèrent de sanglots, alors que son corps glissa sur le sol. Elle n’en pouvait plus! Relevant son regard désespéré, elle vit la lumière argentée de la lune flotter jusqu’à elle. La fenêtre! Sans hésiter, Abigail se leva, haussa ses jupes et enjamba la fenêtre. Prise de peur, elle courut jusqu’en ville, effrayée que son père l’ait vu prendre la fuite. Mais dès qu’elle fut avec ses frères et sa sœur, elle oublia tout. Abigail dansa beaucoup, avec maints partenaires. Beaucoup dont elle ne connaissait même pas le nom. Elle flirta avec plusieurs. Elle en embrassa deux. Elle but quelques gorgées de bière dans le verre d’un et s’endormit dans les bras de l’autre.

Lorsqu’elle se réveilla le lendemain, ce fut réveillée par ses frères, qui étaient quasiment en train de la soulever. Les quatre adolescents, prenant connaissance de l’heure, se mirent à courir vers leur maison, mais il était bien trop tard. Lorsqu’elle rentra, la robe inachevée était déjà partie…

Si ses frères et sa sœur s’en tirèrent presque sans reproches, il n’en était pas de même d’Abigail.

-De quoi avons-nous eu l’air devant la femme de chambre de la comtesse? Tu aurais pu obtenir davantage de contrats avec une telle commande!

-Mais non! continua son père. Mademoiselle voulait aller fêter. Mademoiselle est trop égoïste pour penser à sa famille.

-Je suis désolée, je ne voulais pas…

-Évidemment que tu ne voulais pas! Eh bien, moi, je ne voulais pas de toi comme enfant!

Abigail, qui était restée droite, recevant les insultes de plein fouet, sentit celle-ci lui fendre le cœur. Son regard se braqua sur son père et décidée à ne pas faiblir, s’avança vers lui. La colère brûlait en elle. Elle ne pouvait s’arrêter. Sa respiration s’accéléra et ses yeux s’agrandirent.

-Comme si quelqu’un pouvait vouloir de toi comme père!

La gifle partit sans qu’Abigail puisse la prévoir. Sa tête rebondit comme une balle, sa joue chauffait, mais même cette humiliation n’était pas assez pour l’arrêter. Le regard encore flambant de colère avec un sourire méphistophélique sur les lèvres, Abigail tendit l’autre joue, attendant sagement. Mais rien ne vint. Son père sortit en catastrophe de la maison. La jeune fille savait qu’il allait encore à la taverne. Elle ne gagna de sa mère qu’un lourd regard de reproche. Elle s’en était tirée pour cette fois…

Quand elle entra dans la chambre, elle trouva Maggie, cachée derrière une poupée de chiffon qu’elle lui avait faite. Dans un coin, trois cadeaux emballés aux couleurs pastels. Sa sœur, à douze ans, recevait honteusement des cadeaux de multiples hommes inconnus. Personne n’était dupe dans la famille des escapades de Maggie chez leur grand-mère. Abigail s’approcha et s’assit sur le lit aux côtés de sa sœur.

-C’est fini, chérie. Ils ont eu ce qu’ils méritaient, tu sais?

-Mais ils sont fâchés contre toi, s’inquiéta Maggie.

-Ils le seront toujours. Je n’ai guère l’intention de me laisser marcher sur les pieds. Je maintiens ma promesse, chaton; un jour, nous vivrons dans un palais. Nous deux, contrairement à Jack, Walter, Margaret, maman et papa, sommes faites pour vivre une fantastique histoire. Tu sais le genre d’histoire qu’il y a dans les romans? Plus question d’être Éponine et Azelma! Nous aurons la même histoire que Cossette! Tu rencontreras un Marius, qui t’aimera au premier regard. Je serai amoureuse d’un jeune homme magnifique avec qui je vivrai un amour impossible.

Maggie éleva son candide regard noisette vers sa sœur.

-Avoues-le que tu parles d’Enjolras, la taquina la cadette.

Abigail rougit et se mit à rire en serrant sa sœur dans ses bras. Sa chère sœur qui savait si bien lire en elle.

***

-Allez, les filles! On se remet au travail!

Abigail, maintenant âgée de seize ans, soupira avant de cacher son livre dans ses jupons. Elle avait si hâte que la journée soit terminée. Elle avait hâte de retrouver Maggie, qui travaillait à la poste. Même lorsqu’elles étaient éloignées l’une de l’autre que quelques heures, c’étaient pour les deux sœurs un véritable supplice. Mais reprenant le travail, Abigail se força à penser aux quelques pages qu’elle avait eu la chance de lire durant sa pause. Totalement plongée dans la lecture des Trois Mousquetaires, Abigail s’était réveillée en plein milieu de la nuit, pensant au fougueux d’Artagnan et avait passé le reste de la nuit à s’abîmer les yeux sur le fin papier rempli d’écriture noire. Penchée sur son ouvrage, elle s’imaginait presque retenue prisonnière au Louvre par Richelieu et secourue par d’Artagnan, enamouré d’elle. Elle ne fut sortie de ses pensées que par la chef de l’atelier qui prononça son nom. Levant la tête, Abigail vit un gentilhomme s’avancer vers elle. Un homme de la fin quarantaine, les cheveux gris, d’une silhouette avantageuse et d’une mine honnête. Ses yeux étaient vifs et l’intelligence perçait dans son regard. Il s’arrêta devant elle. Automatiquement, Abigail se leva.

-Abigail Howard? C’est vous qui avez produit cette pièce d’art?

Il sortit de sa poche une paire de gants de soie brodée. Instantanément, la jeune femme reconnut l’œuvre.

-Oui, ce sont les gants que j’ai fait le mois dernier pour madame Foster.

-Enfin! soupira le gentleman. Cela fait près de deux semaines que je vous recherche. Mademoiselle, vous savez certainement que vous avez un talent, que dis-je, un don extraordinaire? Je vous offre un emploi. Bien mieux rémunéré qu’ici, évidemment. Je suis le propriétaire des magasins Canny. Vous connaissez? Évidemment que vous connaissez, voyons! Cependant, je n’ai guère le temps d’attendre pour votre réponse. J’ai besoin des meilleures couturières sur une commande de la Reine! De la Reine, vous entendez? Alors si vous n’êtes pas intéressée, je n’ai guère le temps de m’attarder. Dans le cas contraire, mon carrosse vous attendra ici demain matin à l’aube en direction de Manchester.

L’homme allait partir sans avoir laissé une seconde à Abigail pour dire un mot. Il revint une seconde plus tard, un grand sourire accroché à ses lèvres épaisses.

-Pardonnez-moi, mademoiselle. Je ne vous ai même pas dit mon nom. Richard Somerset. J’espère vous voir demain, évidemment!

Sur ce, il quitta précipitamment, faisant claquer ses bottes sur le plancher sale de l’atelier, laissant Abigail à demi-évanouie, bien loin de penser à d’Artagnan ou à Enjolras.

Dès qu’elle finit sa journée de travail, Abigail alla chercher sa sœur à la poste afin qu’elles rentrent ensemble, mais elle était toujours dans un état comateux. Elle expliqua tout à sa sœur.

-Mais tu ne peux pas partir, Abby! s’exclama Maggie, troublée que sa sœur pense à l’abandonner.

-Maggie, tu dois comprendre! Tu as envie de vivre toute ta vie comme ça? À 17 ans de te marier, de tomber enceinte et de vivre pauvre entourée d’une marmaille d’enfants affamés? Pas moi, tu sais?

-Et moi dans tout ça? supplia presque sa sœur.

-J’y ai pensé. Tu ne crois tout de même pas que je n’ai pas pensé à toi! Je mettrai chaque semaine de l’argent de côté et un jour, j’en aurai assez pour revenir et nous faire vivre décemment toutes les deux. Nous ouvrirons même notre propre boutique. Je te le promets.

Le regard de sa sœur rendit Abigail coupable de la décision qui l’avait torturée tout l’après-midi.

-Maggie, regardes-moi. Non, regardes-moi en face. Bon. Tu sais très bien que tu es la seule personne que j’aime sur cette terre. Tous les autres pourraient mourir, j’en n’aurais cure. Mais toi, toi, tu es ma vie! Jamais, je ne te laisserai tomber. Promis!

Ses parents étaient évidemment totalement d’accord. La seule condition pour qu’ils laissent partir leur fille soudainement devenue chérie était qu’elle leur envoie le trois quart de son salaire pour faire vivre le reste de sa famille. Abigail acquiesça silencieusement, en regardant sa sœur du coin de l’œil. La jeune femme enverrait assez d’argent chaque semaine à Maggie au bureau de poste directement pour qu’elle puisse manger convenablement. Et au diable les parents! Le lendemain, elle partait à Manchester!

***

-Où est la meilleure employée du monde? demanda candidement Richard Somerset en entrant dans la boutique qu’Abigail venait de fermer.

-Monsieur Somerset, voilà une question idiote. Je suis pour l’instant la seule employée ici et je suis devant vous, blagua la jeune femme en souriant.

-Évidemment!

Monsieur Somerset disait toujours « évidemment » et Abigail le trouvait bien drôle. Avec son air de gentil oncle, ses cheveux gris toujours en bataille et ses chapeaux hauts-de-forme mis de côté, son patron et bienfaiteur plaisait bien à la jeune femme.

-Mademoiselle Howard, pouvez-vous venir dans l’arrière-boutique quand vous aurez fermé les lumières?

-Évidemment, monsieur, blagua Abigail.

Elle s’exécuta et alla rejoindre son patron. Lorsqu’elle entra, elle le trouva à genoux devant elle. Sa bouche s’ouvrit grandement sous la surprise.

-Monsieur Somerset, que faites-v…?

-Mademoiselle Howard, vous savez l’affection particulière que j’ai pour vous depuis notre première rencontre. Vous savez combien je vous respecte et combien je vous apprécie. Apprécie n’est pas réellement le mot approprié. Combien je vous aime, évidemment. C’est pourquoi je vous demande solennellement si vous accepteriez de devenir ma femme?

À voir ce grand homme riche, important, désigné par la Reine comme fondateur de mode, à genoux devant la petite couturière qu’elle était, le cœur d’Abigail fondit. Elle appréciait monsieur Somerset, mais ne l’aimait pas. Elle le respectait, c’était l’important. Et avec lui, au moins, elle n’aurait plus besoin de travailler et aurait enfin la chance de vivre une vie confortable. De vivre ce dont elle rêvait adolescente : de se lever le matin dans un lit douillet à l’odeur du chocolat et des viennoiseries, de paresser jusqu’à midi en peignoir, de passer l’après-midi à lire et danser toute la nuit dans les bals de la capitale. C’est donc sans la moindre hésitation qu’elle répondit oui à Richard.

***

Il était près de deux heures du matin. Abigail, toujours dans le boudoir, lisait. Tournant les pages sans arrêt, à une vitesse presque effarante, elle parcourait les lignes d’un œil avide. Puis, soudainement, elle jeta le roman de Richardson sur le mur avec grand fracas. Quelle idiote cette Clarisse! Abigail se leva, colérique. Aussi impulsive, frondeuse et rebelle que dans son adolescence, elle n’arrivait pas à croire à ce qui lui arrivait! Elle avait tout fait parfaitement. Le mariage, la nuit de noces, la lune de miel, les années paisibles, tout cela avec l’abnégation parfaite d’une reine! Et elle n’arrivait pas à donner à Richard la seule chose qu’il désirait! Impossible! Qu’est-ce qui clochait? Ils étaient tous deux en bonne santé! Elle ne comprenait tout simplement pas! Voilà maintenant deux ans qu’Abigail sombrait dans une tristesse de plus en plus profonde. Même ses romans préférés n’arrivaient plus à la distraire. Même les éditions originales que son mari se procurait à grand prix ne parvenaient pas à accrocher un sourire aux lèvres de son épouse. Se retirant progressivement de la société, madame Somerset avait fini par ne plus sortir du tout de la maison, se renfermant sur elle-même, passant ses journées en robe d’intérieur. Abigail ne comprenait pas ce qui lui était arrivé. Elle se détestait. Avec la rage d’une racée bafouée, la jeune femme sortit de la pièce en marchant sur le livre de Richardson dans sa colère, claquant la porte derrière elle. En arrivant dans sa chambre, Abigail prit sa ration de laudanum et se coucha, sans qu’elle ne puisse dormir.

Le lendemain matin, elle se leva vers les dix heures, les yeux rougis d’avoir trop pleuré. Descendant à la cuisine pour réclamer son café, Abigail traversa le salon et vit son mari dormant dans son fauteuil.

-Richard? Mais, voyons, Richard, qu’est-ce que sont ses manières?

La jeune femme s’approcha, les sourcils froncés, lorsqu’elle ne constata aucune réaction de son époux.

-Richard? appela-t-elle en touchant sa main.

Le bras tomba mollement dans le vide, laissant tomber une fiole vide et une lettre sur le tapis, arrachant un hurlement mortel de la gorge d’Abigail.

***

Relisant une nouvelle fois la lettre chiffonnée, la jeune veuve se mordit les lèvres. Elle connaissait le texte par cœur.

« Abby, ma chère et tendre Abby,

je sais que vous voulez cet enfant plus que tout au monde, je sais que c’est moi qui ne peut vous offrir ce cadeau du ciel, vous voir si triste par ma faute m’est insupportable tout comme l’idée de vivre sans vous. J’espère que vous pourrez vivre sans moi et avec le père des enfants que je n’ai pas su vous donner.
Je vous aimerai pour toujours,
Richard.»

Il s’était suicidé au laudanum. Il avait été dérobé une de ses fioles dans sa pharmacie et l’avait entièrement bue. Il n’était guère étonnant qu’il fut décédé. Dès le lendemain, Abigail, en deuil, passa chez le notaire et fit valider le testament de feu son mari. Comme elle s’y attendait, son entière fortune lui était léguée. Abigail bénit le saint homme et remercia le Ciel de lui avoir envoyé un tel homme. Après avoir finalisé toutes les fermetures de dossiers, dont la vente de sa demeure, et avoir remis les clés des boutiques à la gérante, la jeune femme n’avait qu’une jeune idée, seule de retourner à son village natal pour aller chercher Maggie, qui n’avait jamais quitté ses pensées. Mais en arrivant, quelle ne fut pas la surprise d’Abigail lorsqu’elle découvrit que plus personne n’y habitait. Pas une âme qui vive, même plus d’animaux dans les enclos, les champs à l’abandon. Voilà maintenant plusieurs jours qu’elle avait fait cette triste constatation et qu’elle errait dans les auberges des villes avoisinantes, remuant son chagrin. Il était impossible que Maggie soit morte! Impossible! Elle l’aurait senti, elle l’aurait su!

-Vous semblez triste, ma petite dame, lui dit le tenancier, en la voyant regarder son verre de manière mélancolique.

-Je lui suis, monsieur. Je suis venue retrouver ma famille dans ce village et ils sont tous morts…

-Oh, vous savez, il y a eu quelques survivants. Ils sont tous partis en Amérique par le premier bateau.

Abigail se redressa sur sa chaise et fixa le tenancier.

-Vous jurez que vous dites vrai?

-Évidemment!

Évidemment! Ce mot était comme l’assentiment d’outre-tombe de Richard! Maggie était toujours vivante, Abigail en était certaine! Jetant deux pièces sur le comptoir, elle quitta précipitamment. Aussitôt revenue à sa chambre dans l’auberge, elle chargea son écuyer de trouver trois places sur le prochain bateau en provenance de New-York et sa femme de chambre de faire les bagages.

***

-Grande dame, où peut-on vous conduire? demanda un guide sur le port.

Abigail était encore incertaine sur ses jambes et la sensation de la terre ferme lui donna le tournis après deux mois en mer. Elle se sentait même fiévreuse, mais elle n’avait guère le temps d’attendre. Néanmoins, elle débarquait au port de New-York avec l’élégance d’une lady anglaise, impeccable dans ses magnifiques vêtements et obéie à la perfection par ses serviteurs. Après tout, si elle n’avait pas le titre, elle en avait certainement la richesse. D’un air hautain, elle parla au guide dans une voix impérieuse qui n’avait plus rien de la campagnarde.

-Au Palace. Le plus rapidement possible, je vous prie.

-Eh bien, si vous voulez y être rapidement, il va falloir passer par des quartiers malfamés.

-Faites, mon brave, faites.

Montant dans une berline de location avec sa femme de chambre, Abigail admirait sa première vue de l’Amérique, alors que le guide et son écuyer s’installaient à l’extérieur. Aussitôt que les bagages de madame furent montés, on fouetta les chevaux et fit grand train. On ne peut ici vous décrire la laideur des quartiers que traversa notre héroïne, mais il va s’en dire qu’elle eut légèrement peur. Et si New-York était entièrement comme ceci? Ses mains se crispèrent dans ses gants de cuir mince. Alors qu’ils traversaient Five-Points, un événement attira l’œil d’Abigail. Un homme était couché sur le sol, probablement inconscient et six autres continuaient de le frapper honteusement. Son estomac se retourna d’indignation.

-Arrêtez le carrosse! Ordonna-t-elle.

-Ici? À Five-Points? Impossible, madame, c’est un véritable coupe-gorge, lui répondit le guide.

-Arrêtez le carrosse! Répéta-t-elle, impérieusement.

Avant même que la berline fut arrêtée, Abigail se jeta hors de la voiture et se dirigea vers cette bagarre injuste. Elle ne réfléchissait même pas à ses mouvements, à ce qu’elle faisait. Tout ce qu’elle savait, c’était qu’elle voulait libérer cet homme.
-Éloignez-vous de lui, immédiatement, bandes de vautours! Vous n’avez aucun honneur? Frapper un homme au sol? Vous êtes des lâches!

Un des assaillants se rapprocha d’elle. Et c’est à cet instant qu’Abigail réalisa qu’elle s’était mise dans un sale pétrin.

-Si Milady veut la remplacer, c’est tout à son choix, ironisa-t-il, en tentant sa main vers elle.

Vivement, Abigail frappa cette main inquisitrice de son éventail. Outrée, elle regarda ces hommes et n’eut plus peur. Elle savait une chose, c’était qu’elle devait aider celui qui était au sol.

-Vous osez attaquer une dame? Vous êtes également malséants, impolis et les pires hommes qui puissent exister! J’exige que vous libérez cet homme, peu importe ce qu’il vous a fait!

-Vous vous moquez de nous?

-Absolument pas! répliqua Abigail, élevant son nez pointu en sa direction, sans ciller.

Un coup de pistolet éclata au loin. La jeune veuve se retourna et vit avec une grande joie le sheriff et son écuyer arriver près d’eux. Aussitôt, les vilains prirent la fuite. L’homme de loi s’approcha d’elle, qui lui expliqua la situation. Il regarda l’évanoui.

-Je ne le connais pas, celui-là. Je vais le laisser là. Quand il se réveillera, il retrouvera son chemin.

-Mais, vous êtes fous? Dès que vous serez partis, ils reviendront s’en prendre à lui.

-Très possible. Mais qu’est-ce que vous voulez que j’y fasse, moi, hein?

-Quel pays de barbares! s’étonna Abigail, alors que le sheriff s’éloignait déjà.

Sa décision était vite prise et avec l’aide de son écuyer, elle hissa le blessé dans la berline, qui repartit immédiatement vers le Palace.

***

-Madame, madame! s’écria Ketty en arrivant dans le boudoir de sa maîtresse. Il s’est réveillé!

Le visage d’Abigail s’illumina pour la première fois en plusieurs mois. Elle délaissa immédiatement son livre, les Mémoires de Sainte-Hélène, et se précipita en robe de soirée vers sa chambre où le blessé avait été couché. En entrant dans la chambre, elle le trouva assis dans le lit, confortablement adossé dans les dizaines d’oreillers blancs. Abigail s’assit à ses côtés, froissant ainsi sa jupe et sa crinoline. C’est à cet instant qu’il remarqua qu’elle était dans la pièce et qu’il la vit. Abigail sentit son cœur lui serrer lorsqu’elle croisa le regard vert du jeune homme. De tout le temps qu’il était évanoui, elle ne l’avait guère regardé, laissant les soins à Ketty, mais à l’instant où ses yeux percèrent les siens, Abigail sentit sa bouche devenir sèche, ses mains devenir moites et ses joues devenir roses. Grand garçon efflanqué et maigre, il avait une lourde tignasse rousse et le visage constellé de taches de rousseur. Son nez est droit et long, presque pointu, alors que sa bouche est démesurée trop grande pour son visage mince aux joues creuses. Mais il lui semblait bien facile de l’oublier lorsqu’elle croisa ses grands yeux d’un vert magnifique, chastement cachés sous ses grands cils.

-Vous allez bien?

-Oui, répondit-il simplement.

Abigail sourit tendrement et se rapprocha de lui. Élevant ses bras, elle réajusta le bandage sous ses cheveux roux.

-J’en suis contente, alors.

Le regard vert la fixa plus intensément. Elle se sentit mal à l’aise.

-Pourquoi m’avez-vous sauvé?

-Pourquoi vous ont-ils battus?

-Parce que je suis Irlandais, glissa-t-il simplement.

-Et bien, je vous ai sauvé parce que je suis Anglaise.

Un rictus tordit la bouche trop grande du jeune homme.

-Les Anglais détestent les Irlandais, et nous vous le rendons bien.

-Vous êtes le premier Irlandais que je rencontre, monsieur, et comme démonstration d’haine, je crois qu’on a vu pire, n’est-ce pas? ricana Abigail.

Mais après qu’elle eut dit le dernier mot, ses sourcils se froncèrent. Pourquoi se comporta-t-elle ainsi? Comme une échappée de couvent?

-Qui êtes-vous? demanda simplement le blessé en fixant toujours son regard sur Abigail, qui rosissait de plus en plus.

-Qui êtes-vous? répéta-t-elle, avec un air de coquette qui ne lui ressemblait guère.

-Sean O’Malley.

-Violette Sutherland.

Quoi? Pourquoi avait-elle dit son prénom de baptême et le nom de sa belle-mère? Qu’est-ce qui lui était arrivé? Abigail ne se comprenait même plus!

-Je vous appellerai Milady.

-Vous avez lu les Trois Mousquetaires? s’étonna-t-elle.

-Évidemment.

Abigail eut un sourire étrange et posa sa main sur celle de Sean.

**

-Milady, je ne crois vraiment pas que ce soit approprié.

-Je vous en pries, monsieur O’Malley, je n’ai pas été en société depuis si longtemps et je n’ai guère envie de passer la soirée seule à repousser les vieux messieurs.

-C’est bien parce que vous m’avez sauvé la vie, marmonna Sean, en nouant sa cravate.

Abigail patientait dans le salon de sa suite au Palace. C’était la seule soirée qu’elle avait à New-York, puisqu’on lui avait dit que tous les nouveaux arrivants poussaient vers l’Ouest et qu’elle désirait plus que toujours retrouver Maggie. Mais elle ne pouvait partir de nuit, alors aussi bien en profiter. Un bal se donnait à l’hotel de ville et Abigail, en tant que dame de la société anglaise, comptait bien y assister. En compagnie de son protégé!

Habillée d’une somptueuse robe lilas, à l’immense crinoline, ses longs cheveux remontés dans un chignon torsadé, dont quelques boucles s’échappaient, tombant sur ses épaules nues, Abigail était tout simplement magnifique. Et c’est comme une princesse que la vit Sean lorsqu’il sortir de la chambre. Et cette princesse lui sourit d’un sourire si doux qu’il sentit ses mains s’engourdirent.

***

Maintenant, elle marchait, mais distraitement, analysant les événements de la journée. Elle lui avait sauvé la vie, elle l’avait soigné, elle l’avait invité à un bal. Il l’avait fait dansé, il l’avait complimenté, il avait fait glisser sa main sur sa peau nue. Ils avaient failli s’embrasser à la fin d’une valse. Il s’était enfui. Soudainement, un éclair noir la précipita sur l’écorce d’un arbre. Elle s’y effondra avec douleur. Sous le choc, elle avait fermé les yeux. Des mains lui empoignaient les épaules fermement. La jeune veuve regarda ce qui l’avait ainsi lancée. Elle ne fut qu’à moitié surprise lorsqu’elle reconnut Sean. Elle murmura son prénom douloureusement. Son corps était collé contre le sien et sa tête était entre son épaule et son cou, alors que ses bras se refermèrent sur elle. Abigail se ramollit sous son contact, mais son cœur battait à un rythme fou.

-Un égout ouvert. Juste devant vous.

La demoiselle soupira. Elle avait encore faillit faire une gaffe énorme. Une fois de plus il avait été là pour la sauver. Gênée, elle baissa la tête et commença à pleurer, sans le vouloir. Mais ces larmes coulaient sans bruit, sans sanglots, elles ne faisaient que signifier sa tristesse d’être aux côtés de celui qu’elle aimait et de se sentir si idiote.

-Je m’excuse, Sean. Je suis désolée d’être aussi sotte.

-Quoi ? Mais qu’est-ce que vous racontez ? demanda-t-il, en reculant son visage pour voir le sien.

Il voyait les larmes glisser sur la figure blême de chagrin. Qu’avait-elle ? Était-elle blessée ? Doucement, avec son index et son majeur allongé, posés sous le menton hautain, il releva la tête de la demoiselle, mélangeant ses perles aux gouttes de pluie glacées qui continuaient de les marteler. Il plongea ses yeux dans les siens. Les pleurs les avaient rendus d’un bleu encore plus perçant, presque cyan, et terriblement brillants. Sean ne put s’en détacher. Abigail fut incapable de répondre à la question qu’il lui avait posée. Un nœud s’était formé dans sa gorge, l’empêchant de dire un seul mot. Le froid et la proximité du jeune homme la paralysaient totalement. Sean la sentit grelotter contre lui. Elle tremblait… Sans vraiment penser à ce qu’il faisait, il la serra dans ses bras. Elle avait sûrement peur… Ce corps frêle qui était collé contre le sien le rendait fou. Son estomac se tordit de plus belle, ses jambes étaient flageolantes. Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Il se sentait étourdi et ses membres semblaient refuser de lui obéir. Est-ce qu’elle utilisait une magie quelconque ? Abigail se laissa prendre par Sean. Il l’entoura de sa chaleur. Elle était si bien ainsi, si ce n’était que des milliers de frissons qui la parcouraient toutes entière, qui ne la faisaient que plus trembler. Elle le regarda. Il était si beau ainsi, son long visage incliné vers elle, ses courtes mèches rousses collant à sa peau. Son regard la brûlait, mais aucun des deux ne semblaient décidé à vouloir quitter celui de l’autre. Et, au moment où Sean éleva sa main pour enlever un fil d’or de la joue de la jeune femme, celle-ci n’y tint pas. On ne pouvait pas exiger d’elle qu’elle ne bouge pas dans une telle situation. Son cœur battait si fort qu’elle l’entendait, ses tempes lui serraient affreusement et elle n’en pouvait plus de frémir d’excitation et d’appréhension ainsi. Sans plus réfléchir, elle se hissa sur la pointe des pieds et approcha son visage de celui de Sean. Abigail vit les pupilles de ses yeux trembler avant qu’elle ne ferme les siens. Tendrement, avec une retenue qui ne lui ressemblait pas, elle posa ses lèvres sur celles de Sean. Juste un effleurement qui ne dura qu’une seconde, aussi léger qu’un battement d’ailes de papillon. Mais ce fut assez pour que la jeune femme se sente nauséeuse d’excitation et qu’elle sente que le ciel lui tomberait sur la tête, bientôt. Cependant, elle réalisa bien vite ce qu’elle venait de faire et ses larmes cessèrent aussitôt. Abigail eut seulement l’envie folle de fuir. Qu’est-ce qui lui avait pris de faire cela ? À Sean ? Son esprit tournait à un rythme fou. Elle devait partir, mais elle était prisonnière de ces bras, de cette chaleur, de cette odeur. Son corps refusait de bouger. La demoiselle se contenta de baisser encore une fois la tête, prise d’une timidité qui semblait la dévorer entière. Elle se sentait si honteuse.

Sean l’avait regardée s’approcher de son visage, sans rien faire, captivé. Mais quand les lèvres bleuies par le froid de la jeune femme avaient touchées les siennes, il avait figé. Il n’avait pas été capable de répondre à ses avances, ni de la repousser. Elle avait été douce, ses lèvres goûtaient salé, le goût amer des larmes, mais il avait senti une grande chaleur l’envahir, le brûler comme des coupures. C’était agréable, néanmoins. Son estomac s’était tant entortillé sur lui même que Sean le sentait de la grosseur d’un pois. C’était comme si la princesse avait aspiré toute son énergie vitale et qu’il était ravi de la lui donner. Mais lorsqu’elle recula, ce fut comme si tout son corps allait s’effondrer en milles pièces. Perdre cette sensation équivalait à se perdre lui-même. Son âme avait progressivement repris possession de son corps et il fut capable de regarder Violette et son visage baissé. La pluie tombait, un vent la leur lançait en plein visage. Un éclair déchira le ciel, rayant les nuages. Il faisait totalement noir maintenant. Sean trouva que Milady détonnait ici, blanche dans la noirceur, tel un ange en enfer. Soudainement, il fut pris du besoin de l’embrasser, lui aussi. Il ne savait pourquoi, ni comment, mais il semblait impossible de continuer à vivre sans poser ses lèvres sur les siennes, une autre fois, une dernière fois. De la même manière que précédemment, il remonta le menton avec ses longs doigts puis s’immergea une ultime fois dans ces yeux liquides avant de plonger sur sa bouche chevrotante. Aussitôt, la main glissa du menton jusqu’aux cheveux, le pouce sur le cou, deux doigts dans la masse dorée et deux autres sur la joue. Sean semblait ne plus se contenir. Avec son autre main, il rapprocha la taille fine de Violette contre lui, alors qu’il l’embrassait jusqu’à plus de souffle. Un étau serrait son cœur et ses tempes et il sentit des insectes lui monter partout sur le corps et son sang bouillonner dans ses veines, faisant accélérer le rythme de son cœur. Il joua d’audace et lorsque celle qu’il considérait comme une princesse entrouvrit ses lèvres, il y glissa sa langue. La sienne avait un goût sucré de pêche. Sean ne savait pas ce qu’il faisait, mais son instinct et son désir le guida, le poussa à taquiner la langue de Violette.

Abigail ne réalisait pas immédiatement ce qui se passait. Cela ne pouvait simplement pas être réel. Voilà que Sean l’avait serré contre lui et l’embrassait, sa main folâtrant dans ses cheveux. Toute à la passion qui l’envahissait, elle se laissa faire, molle dans ses bras, répondant avec ardeur au baiser qu’il lui donnait. Elle sentait que son cœur allait la lâcher à tout moment, qu’il allait exploser, ou du moins que sa tête le ferait, puisqu’elle y entendait les battements résonner contre les parois de son crâne. Cela devait être un rêve, une illusion. Il lui sembla qu’un couteau lui transperça les reins et elle trouva cela agréable d’être prise par une telle sensation, un tel désir. Tendrement, elle éleva ses mains jusqu’au cou de Sean, qui était anormalement chaud à ce moment. De ses doigts, elle sentit y battre une veine à une vitesse qui ne démontrait que trop bien ses sensations.

Le jeune homme continuait de dévorer cette bouche qui le tentait depuis tellement longtemps, c’était comme s’il ne pouvait s’en lasser. Puis soudainement, il sentit les mains froides de Violette glisser dans son cou. Merde ! Que faisait-il ? Il s’était laissé emporté ! Il ne pouvait pas faire cela ! Quel idiot ! C’était une princesse… Et lui, un moins que rien… Avec regret, ses doigts quittèrent les cheveux et sa bouche, ses lèvres. Ces bras retombèrent, longs et las près de son corps. Sean se recula, laissa Violette pantoise contre l’arbre. Il la regarda. Elle était si belle, ainsi, le corps possédé de frémissements qu’il lui avait inspirés, ses cheveux déplacés par ses doigts, sa bouche encore gonflée de leur baiser. Ses grands yeux le perçaient. Il sentait un couteau lui transpercer son cœur. S’éloigner d’elle lui était si dur. Mais il le fallait… Il réprima son excitation et son désir fou d’elle et tâchant de ne pas la regarder, il prit la fuite. Il ne pouvait se laisser posséder par ses sentiments à son égard. De toutes façons, qu’étaient-ils ses sentiments ? Existaient-ils réellement ? Ou s’ils existaient, étaient-ils plus puissants qu’il ne le croyait ? Violette… Il la voulait contre lui, il voulait encore ses lèvres sur les siennes, sa taille et ses cheveux dans ses mains… Mais il n’arrivait pas à savoir pourquoi. Il ne savait seulement que lorsqu’il pensait à elle, un long frisson lui traversait le corps, qu’une sensation entre les reins le prenait et que son ventre se distordait affreusement. Mais étonnement, ses perceptions n’était pas désagréables, il aimait même les sentir prendre possession de lui. Elles étaient comme une grande puissance qu’il n’était pas capable de réprimer. Il fallait qu’il fuit, qu’il s’éloigne d’elle. Violette était devenue trop puissante.

La jeune veuve le regarda s’éloigner dans les arbres. Elle s’effondra sur le sol, ses jambes n’étant plus capable de la soutenir. Elle avait déjà supporté assez d’émotions. La faiblesse s’empara d’elle. Il s’était enfui. Sean l’avait embrassé puis avait disparut comme s’il regrettait son geste. Que devait-elle faire ? Elle se remit à pleurer, mais à sangloter aussi. Le froid et l’humidité la glaçait, la peur refit surface, ainsi que la douleur à son épaule. Il y avait encore ces ignobles espions et Sean, qui était parti ! Il s’était détourné d’elle. Elle cria son nom dans la pluie. Il résonna, en écho, sans apporter une réponse. Ce silence déchira le cœur de la demoiselle. Elle n’était pas faite pour souffrir ainsi. Ce n’était pas à elle de supporter ce fardeau. Fuir était pour elle aussi l’unique solution.

***

C’est donc fiévreuse, troublée de son premier amour et malade que Abigail s’embarqua vers l’Ouest le lendemain matin, la mort au cœur. Elle devait à tout prix retrouver Maggie. Elle était la seule qui pouvait l’aider, la seule qui pouvait l’aimer. Mais le voyage fut dur pour Abigail et ses serviteurs, après l’avoir retrouvée évanouie, décidèrent qu’il était plus sage d’arrêter à Saint-Elmo pour la faire soigner avant de continuer cette folle équipée.




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Dernière édition par Abigail Violette Somerset le Mer 28 Sep - 6:18, édité 1 fois
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Grace Earp

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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 6:13

Bienvenue sur le forum Abigail !
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 6:22

Bienvenue Abigail!
J'espère que tu te plairas dans notre charmante petite ville de Saint Elmo!
Cela me fait penser que je dois absolument voir Melancholia avec Kirsten Dunst.
A bientôt!
Wink
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 8:27

Bienvenue ma très chère soeur :coeur2:
Je file lire ta fiche, j'ai l'impression qu'elle t'as pas mal inspiré je suis contente !

EDIT = Son caractère est tout simplement parfait, pile ce que je voulais pour la grande soeur de Maggie. Et l'histoire! A lire c'est un régal, j'ai presque honte de rp avec toi quand je vois la qualité de ta rédaction ! Tout en lisant, je croisais presque les doigts pour que l'histoire ne se termine pas sur la mort de Sean :yeux: J'avais presque l'impression de lire Jane Austen, c'est juste impressionnant. Je pense que je n'aurais pas pu trouver meilleure Rplayer que toi, tu as parfaitement décrypté le personnage et tu as exactement compris ce que j'attendais qu'Abigail soit. Bref, je m'incline parce que là, c'est magnifique. :coeur2:
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 9:52

Bienvenue Abigail et quelle fiche ! Malgré sa longueur Wink, elle est d'une facilité déconcertante à lire ! Vraiment très agréable de s'accrocher ainsi au texte. Et qui plus est, tu viens de faire une heureuse très chère Smile
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 11:50

Quelle fiche!! OUAH!!
Bienvenue. Very Happy
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 13:29

Ça c'est pas de la petite fiche Shocked
Je crois que tu viens de battre le record du monde de longueur de fiche Razz
(je dois avouer que je n'ai pas tout lu encore ou je vais arriver en retard au boulot)

En tout cas, bienvenue sur Saint Elmo Abigail ^^
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 15:32

Merci à tous pour vos bienvenues et vos compliments, cela me touche droit au coeur! Je sais, je sais, j'ai trop écrit, mais le personnage d'Abigail m'inspirait réellement et je n'ai pas pu m'en empêcher. Au fait, Benjamin, j'ai déjà écrit des fiches de présentation beaucoup plus longues XD Je suis une terreur pour les fiches. Mais ne craignez rien, je n'écris pas autant en RP!

Maggie, je suis vraiment contente que tu aimes, car j'ai pris beaucoup de libertés avec le personnage tout en respectant les lignes de sa biographie. Mille mercis, tu es vraiment adorable! :coeur: Mais si tu continues à m'abreuver ainsi de compliments, mes chevilles ne me soutiendront plus XD Ne t'inquiètes pas pour Sean, il a une place très spéciale pour Abby et il va bientôt rejoindre Saint-Elmo en forme de scénario! Ohhh ouiiiii! En fait, si je suis validée (a) Hâte de RPlayer avec toi! J'imagine que tu as pleins d'idées en tête pour leur relation future!
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 16:18

Wouhhhh pinaise affraid
Reccord de longueur battue sur Saint Elmo, je suis sous le choc de ma lecture xD
Bravo à toi car loin d'être longue et désagréable, j'ai beaucoup aimé lire l'histoire de ton personnage Very Happy

Si c'est ok pour Maggie, c'est ok pour moi Very Happy
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 16:18


fiche validée !

Ca y est! Tu as été validée par l'administration, tu peux désormais rejoindre le RP alors bienvenue parmi nous! Tout d'abord, pour t'imprégner du décor et de l'ambiance, tu peux lire les topics créés dans la partie "Aide"; ensuite, tu peux créer tes demandes de liens, demandes de topics ainsi qu'ouvrir ton coffre fort qui te permettra de ranger soigneusement tes derniers achats. N'oublie pas que tu peux aussi trouver un métier et ainsi, recevoir un salaire! Enfin, pour te détendre et faire connaissance avec le reste des joueurs, direction : LE FLOOD!

Maintenant, c'est à toi de jouer Very Happy
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Dehlia James

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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 16:27

Juste un détail, je t'ai ajouté aux "Etrangers" car tu n'es pas née ou que tu n'y travailles pas encore à Saint Elmo mais au fil du temps et de l'évolution de ton personnage, on pourra changer de groupe Wink
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 16:42

Ça me va parfaitement. En fait, j'aime mieux ça! Je n'avais simplement pas remarqué ce groupe!

Merci pour la validation, Dehlia. J'espère que je n'ai pas trop bousillé tes yeux avec la longueur de ma fiche. Désolée ^^'

Youpiiiiii! :pompom:
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MessageSujet: Re: Abigail Violette Somerset, une rose anglaise.   Abigail Violette Somerset, une rose anglaise. EmptyMer 28 Sep - 17:16


Et je t'avoue que j'ai hâte que ton Sean soit là pour vous voir rp :coeur:
Yes tu es validée, à nous le topic des retrouvailles larmoyantes ! :pompom:
Oui, j'ai pas mal d'idées, je pense qu'on va bien s'amuser !

Dehlia :: J'avais hésité pour le groupe, comme il y en avait plusieurs qui correspondait ^^
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